« Une montagne Zéro déchet sauvage en 2030 ». Tel est l’ambitieux objectif fixé par l’association Mountain Riders en 2020. Pour y parvenir, le fonds de dotation Génération Montagne, créé en 2022 par Domaines Skiables de France au sein du fonds Essentiem, accompagne cette démarche et contribue à la phase de sensibilisation et de formation des acteurs.
La première phase de ce projet consiste en effet à rendre autonomes les acteurs de la montagne (offices de tourisme, gestionnaires de domaines skiables) pour organiser leurs propres ramassages. Rendre « automne » signifie former ces acteurs pour réaliser dans de bonnes conditions un ramassage et une caractérisation des déchets récoltés.
Montagne Zéro Déchet : une charte nationale pour mobiliser tous les acteurs
Pour atteindre une montagne Zéro Déchet Sauvage en 2030, l’association Mountain Riders a souhaité mobiliser tous les acteurs de la montagne, au travers d’une charte nationale. « Cette charte nationale est le moyen de formaliser, et de donner corps à l’objectif. Elle a été co-construite avec l’ensemble des acteurs de la montagne », nous explique Émilie Maisonnasse, responsable Zéro Déchet au sein de l’association Mountain Riders.
Le 16 mars dernier, cette charte nationale a été signée, avec l’engagement d’une dizaine de parties prenantes. « C’est un accord historique que tous les acteurs de la montagne (que ce soit des institutionnels, politiques ou acteurs économiques) s’accordent sur un sujet environnemental. Cela est déjà une réussite en soi».
Soutien du fonds Génération Montagne
Le fonds Génération Montagne intervient dès la première phase de ce projet, en permettant de former et rendre autonomes les stations sur l’organisation du ramassage et l’animation d’une caractérisation. Le soutien du fonds Génération Montagne permet que la formation soit prise en charge à 100%.
« Organiser un ramassage, tout le monde sait le faire, faire une caractérisation, comprendre pourquoi c’est important de la faire, savoir comment le faire le jour J et se rendre compte que cela n’est pas compliqué demande un temps de formation », nous précise Emilie Maisonnasse.
Montagne Zéro Déchet : une stratégie en trois temps
La stratégie du projet Montagne Zéro Déchet est constituée de trois étapes. Le premier temps consiste à former et outiller, le deuxième temps est consacré à la caractérisation des déchets (afin d’obtenir de la donnée scientifique), pour pouvoir élaborer dans un troisième temps un plan de réduction des déchets à la source.
Des journées de formation pour les acteurs de la montagne
5 journées de formation ont été organisées au printemps 2023 : 2 dans les Alpes du Nord, une dans les Alpes du Sud, une dans le Jura et une dans les Pyrénées. Ces formations d’une journée de 9h à 16h30 sont organisées pour 15 personnes maximum par session, à destination des techniciens de collectivités, des techniciens de remontées mécaniques, des commerçants, … Concrètement, tous ceux qui vont être amenés à organiser eux-mêmes le ramassage et surtout faire une caractérisation des déchets permettant d’alimenter les mesures de la campagne nationale de ramassage.
Ces formations ont été réalisées entre mi-avril et début mai, une période idéale avant les journées de ramassage organisées en montagne.
Au total, ce sont 42 personnes et 46 stations qui ont été formées, certaines personnes pouvant représenter
Mountain Riders
« La formation débute avec un temps d’inclusion et des échanges de pair à pair. Ensuite, il y a un premier volet qui est scientifique et juridique pour expliquer les impacts de la pollution sauvage en montagne. Nous évoquons notamment le temps de dégradation des déchets, les bilans des années passées sur la pollution sauvage, la réglementation en vigueur notamment pour les collectivités, leurs droits et leurs devoirs.
Nous expliquons ensuite comment organiser un ramassage, ce à quoi il faut penser avant, pendant et après, et le timing de la caractérisation. Cette étape permet de rassurer sur la caractérisation des déchets.
L’après-midi, nous organisons des ateliers par petits groupes pour anticiper les opérations de ramassage avec des exercices très pratiques », nous explique Émilie Maisonnasse.
Le retour des participants à cette formation est globalement très positif, comme en témoigne Audrey Lacombe, chargée de projet RSE pour l’Office de Tourisme de la Grande Plagne : « Pour moi, c’est une découverte. Je n’avais jamais travaillé sur ce type d’évènement à La Plagne. Il y avait déjà eu des ramassages de déchets mais en version plus simple, et pas forcément dans le cadre d’un accompagnement avec Mountain Riders. J’attendais surtout d’avoir tous les éléments clés pour organiser une journée de ce type et en profiter pour avoir des retours d’expérience, rencontrer d’autres acteurs de la montagne pour partager nos expériences ».
« L’objectif était de se former sur la caractérisation des déchets. Nous organisons des ramassages de déchets sur la station des Saisies depuis quelques années maintenant. L’objectif était d’avoir des connaissances plus techniques, notamment concernant cette caractérisation des déchets. Durant cette journée de formation, nous avons travaillé sur le scénario où tout se passait bien et un scénario un peu catastrophe. Cela nous a permis d’identifier les freins qui pouvaient exister et tous les éléments à mettre en place pour que tout se passe bien », nous explique la Responsable Environnement du domaine skiable des Saisies qui organise une journée de ramassage des déchets le 03 juin, en collaboration avec la SAEM Les Saisies Village Tourisme et le Club des Sports des Saisies.
Caractérisation des déchets. De quoi parle t’on ?
Concrètement la caractérisation de déchets est une démarche scientifique développée par l’association Mer Terre et reconnue par le Ministère de la Transition Écologique.
« Le but est de partir avec son sac à déchets dans la montagne pour faire la collecte des déchets sauvages puis revenir vider tous les déchets sur une grande bâche pour les trier de façon scientifique afin de mesurer la pollution sauvage », nous explique Émilie Maisonnasse, Responsable de projet Montagne Zéro Déchet à l’Association Mountain Riders.
« Une fois récoltés, on trie le plastique, le carton, le bois, le métal… Puis on comptabilise le nombre de déchets indicateurs un à un. Les déchets indicateurs sont par exemple les masques covid, les mégots, les bouteilles plastiques, les forfaits de ski égarés, les téléphones qui tombent des télésièges. On comptabilise aussi les déchets liés à l’exploitation des pistes et des remontées mécaniques tels que les jalons, le géotextile, les gaines électriques… »
Au total, ce sont 30 déchets indicateurs identifiés qui sont considérés comme spécifiques à l’univers de la montagne et qui sont comptabilisés un par un. Cette caractérisation des déchets permettra d’agir directement sur les acteurs de la montagne et mettre en place un plan de réduction des déchets à la source.
« Les ramassages qui vont avoir lieu entre ce printemps et cet automne vont nous permettre de tirer les premières conclusions et de savoir si nous allons pouvoir atteindre notre objectif.
2023 sera donc l’année 0, en 2024 on espère déjà avoir une réduction de -10%, en 2026 -40%, c’est la trajectoire que l’on espère suivre », précise Émilie Maisonnasse.
39 ramassages avec caractérisation des déchets déjà réalisés en 2022
L’année dernière, ce sont 39 opérations de ramassage qui ont été réalisées, avec une caractérisation de niveau 2. « Nous disposons d’une première cartographie de 39 stations sur ce qu’est la pollution sauvage. Si l’on considère que la montagne française représente entre 250 et 280 stations de ski, 39 ramassages représentent un échantillon de 15-20%, plutôt représentatif. Nous avions ramassé 11 tonnes sur ces 39 ramassages. Si on essaye d’extrapoler sur toutes les stations de ski, on arrive à près de 63 tonnes, un poids indéniable sur la biodiversité. Juste pour illustrer : un mégot qui ne pèse quasiment rien pollue à lui tout seul 500L d’eau. Sur ces journées, nous avons ramassé 24.000 mégots, ce qui correspond à une pollution de 5 piscines olympiques. Là aussi, si on extrapole sur tous les mégots que l’on pourrait ramasser dans les stations de ski, ils pollueraient, sur une année, 28 huit fois le lac blanc situé en face de Chamonix ».
Mais d’un autre coté, 63 tonnes ce n’est rien ! Concrètement si on s’y met tous, on peut arriver à ne plus en avoir.
Si l’on compare aux milliers de tonnes de déchets versés chaque année, puis rejetés par les océans sur la plage, ce n’est rien du tout. Il est important pour nous de stopper cette pollution car il est possible de la stopper », nous explique Émilie Maisonnasse.
Des déchets liés au touriste et à l’activité professionnelle
A l’occasion de la première caractérisation effectuée sur ces 39 ramassages, l’association Mountain Riders a identifié des déchets clairement liés aux touristes (volontaire ou involontaire) : emballages de piques niques, mégots, masques covid ou stick lèvres qui tombe sous les remontées mécaniques. Puis les déchets liés à l’activité professionnelle : jalons de pistes, matériaux de chantier, etc.
Il n’y a pas un seul responsable, mais tout le monde est responsable de la pollution sauvage.
« Nous avons pu voir dans le contenu de la formation, qu’il est important d’intégrer beaucoup d’acteurs d’un territoire. J’avais la chance d’être présente avec un élu et une personne des remontées mécaniques de La Plagne. Nous sommes repartis avec plusieurs éléments concrets sur les étapes, les outils, un petit guide d’aide à l’organisation. Il y a vraiment des outils concrets pour réussir à organiser sa journée de ramassage des déchets. Nous faisons partie d’un tout, et les stations sont engagées dans un même objectif de réduction des déchets sauvages», conclut Audrey, chargée de projet RSE pour l’Office de Tourisme de la Grande Plagne.
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